Dans la collection de podcasts “Votre Cerveau” proposée par Radio France, Grégoire Borst, professeur de psychologie de développement et de neurosciences cognitives de l’éducation, expliquait comment fonctionnent les Fonctions Exécutives et pourquoi il est si important de les développer correctement afin d’apprendre de manière optimale. 🧠
La vie quotidienne serait bien plus compliquée si nous ne disposions pas d’une Fonction Exécutive clé : l’Attention. Imaginez être au travail ou à l’école et être incapable de vous concentrer sur une tâche, perturbé par les notifications des réseaux sociaux, les cris des camarades dans la cour de récréation, la sonnerie de votre téléphone, les voitures qui passent en bas du bureau,… autant de facteurs qui rendrait impossible l’exécution de tâches des plus simples aux plus complexes. 📳
L’Attention joue un rôle majeur dans notre quotidien et se développe très tôt dans notre enfance. Il s’agit de la Fonction Exécutive qui va donner la capacité au Cerveau à se focaliser sur les informations pertinentes dans un contexte donné. Pour un adulte, il s’agit d’être capable de se concentrer sur la route lorsqu’il conduit tout en tenant une conversation avec son passager. Pour les enfants à l’école, c’est la capacité à se concentrer sur ce que le professeur explique malgré les chuchotements dans le fond de la classe. 🔊
Cette capacité à “effacer” des informations pour se concentrer sur d’autres s’appelle la “Cécité Attentionnelle”. Le Cerveau humain a la faculté d’orienter son faisceau attentionnel sur certains points. Avez-vous déjà entendu parlé du test du Gorille, dans lequel il vous est demandé de vous concentrer sur le nombre de fois où le ballon passe d’une personne à une autre ?
Rares sont ceux qui, lors du premier visionnage, remarquent qu’un élément surprenant traverse l’image. Et vous… Avez-vous vu le Gorille ?
Si les enfants d’aujourd’hui ne sont pas moins attentifs qu’il y a 30 ans, leur attention est en revanche bien plus sollicitée qu’avant, au point qu’il est parfois extrêmement difficile pour eux de choisir des cibles attentionnelles de manière adaptée. 👓
Si l’Attention est la base de l’apprentissage, la Mémoire de Travail est l’atelier qui permet de retenir et manipuler les informations pendant un court laps de temps. Soumis à un flot continu d’informations, le Cerveau humain est capable, en moyenne, de retenir jusqu’à sept informations en même temps.
Généralement, le Cerveau ne retient que le début et la fin des longues séries d’informations : on parle d’effet de primauté et de récence. Si vous devez retenir un numéro de téléphone par exemple, il est plus probable que vous en reteniez les premiers et derniers chiffres. 🧠
Pour augmenter le nombre d’informations retenues, le Cerveau utilise des méthodes d’association, plus il combine, plus il diminue les ressources attentionnelles. Le Cerveau manipule l’information afin d’augmenter ses capacités à résoudre des problèmes de plus en plus complexes.
La Mémoire de Travail est particulièrement sensible à l’Attention, mais d’autres types de mémoire existent également, notamment en Mémoire à Long Terme. On parle de Mémoire Sémantique, liée au langage et aux connaissances scolaires ou encore la Mémoire Autobiographique liée aux souvenirs qui nous sont propres et la Mémoire Procédurale associée aux automatismes, comme le vélo, la marche ou la conduite.
La Mémorisation fonctionne en 3 temps, qui forment le cycle de la mémoire :
Résister à un automatisme et sortir de ses habitudes sont possibles grâce à l’Inhibition. Lorsque l’on veut (ou quand on doit) quitter sa routine, la zone du cortex préfrontal prend les choses en mains. Rapidement, notre Cerveau est programmé pour suivre une routine : le matin, nous nous levons, nous buvons notre tasse de café, nous nous lavons les dents, nous habillons, prenons la voiture, suivons la route, arrivons au bureau, buvons une deuxième tasse de café… L’Inhibition est la capacité à se dire “STOP, je m’arrête et je réfléchis”. Et si, je prenais le chemin de gauche à la place de celui de droite ? Ai-je besoin de cette deuxième tasse de café ? ☕
Nous avons évoqué plus haut le principe de fonctionnement de la Mémoire, en association : le Cerveau regroupe ce qui, pour lui, mérite d’être regroupé. Si l’on vous demande de retenir une suite de mots composée des mots “papa, maman, homme, femme” en faisant abstraction du type de voix qui les lit (féminine ou masculine), il est probable que votre Cerveau associe instinctivement les voix masculines aux termes “homme” et “papa” alors que les voix féminines seront peut-être associées à “femme” et “maman”. Dans le même ordre d’idée, le terme “plus que” dans un énoncé de mathématiques, est fondamentalement associé à une addition, ce qui peut parfois induire l’enfant en erreur sur les termes à effectivement additionner.
L’Inhibition est ce qui permet de prendre du recul sur ces associations pour retenir ce qui est pertinent dans un contexte donné.
Apprendre à résister signifie aussi être capable de regarder au-delà de sa propre perception et faire preuve d’hétérocentrisme, une capacité qui n’est pas évidente à maîtriser puisque nous percevons le monde de notre propre point de vue. Développer sa capacité à considérer la réalité selon une autre perspective est pourtant nécessaire pour s’adapter correctement à un monde qui change de plus en plus vite. 👀
La Métacognition est la capacité d’accomplir une tâche ou de résoudre un problème en prenant du recul afin d’analyser une situation en prêtant attention à ce qui se passe dans notre tête.
Imaginez votre enfant dans sa salle de classe, lorsque sa maîtresse lui demande de venir résoudre un calcul au tableau. Oups, le trac, la boule au ventre et un léger malaise le prend. Sa “petite voix” va le rassurer : “Tout va bien, tu es prêt, tu peux rester zen” et après quelques instants de doute, c’est l’optimisme qui l’emporte : “Je sais comment résoudre ce calcul, je l’ai déjà fait avant.”
Votre enfant vient de métacogiter : il a évalué, planifié et anticipé en quelques dixièmes de seconde. 💭
Pour prendre ce recul et analyser, il faut être en capacité de comprendre pourquoi parfois le succès est au bout du chemin et pourquoi, parfois, l’aventure se solde par un échec. En comprenant les erreurs commises, nous analysons nos échecs et pouvons apprendre comment ne pas les répéter. Être capable d’évaluer sa propre performance est au cœur de toutes nos capacités de jugement. 📈
Pourquoi est-il important de développer un bon jugement métacognitif ? Tout simplement pour développer la capacité à juger sa propre expérience, fondamentale pour pouvoir apprendre de nos erreurs et ne pas se surestimer. Le mécanisme cognitif décrivant la tendance à se surestimer se nomme l’effet Dunning-Kruger, et peut s’atténuer en développant sa métacognition.
La métacognition, ou la capacité à réfléchir sur ses propres processus de pensée, joue un rôle crucial dans l’apprentissage des enfants. En leur permettant de prendre conscience de leurs stratégies d’apprentissage, de leurs points forts et de leurs difficultés, la métacognition les aide à devenir des apprenants plus autonomes et efficaces.
La Motivation fonctionne de deux manières : par la promesse d’une récompense intrinsèque ou extrinsèque. C’est un mécanisme fondamental qui est au cœur même de notre apprentissage puisque c’est grâce à la Motivation que l’humain se challenge et se dépasse. 🏅
La Motivation extrinsèque est le moyen qu’a trouvé notre Cerveau pour nous pousser à entrer en compétition avec les autres. Plus gros sont les enjeux de la compétition, plus l’engagement sera fort. À cause du contexte d’abord, mais également grâce à l’idée même d’obtenir une récompense, aussi minime soit-elle. Dès l’annonce d’un gain, la motivation augmente et nous devenons donc plus performants. Un exemple de cette motivation peut s’illustrer par le fait de travailler contre un salaire, ou d’étudier pour un concours dans l’idée d’obtenir le meilleur résultat possible. 👪
À l’opposé de la Motivation extrinsèque se trouve la Motivation intrinsèque, non pas guidée par la performance des autres, mais par sa propre volonté propre d’apprendre et de s’améliorer par envie, afin d’acquérir une nouvelle expérience. C’est une motivation qui nous est propre et personnelle. Dès lors, l’aspect compétitif n’existe plus qu’avec soi-même. Un autre mécanisme se met en place dans le Cerveau : celui du plaisir. Un apprentissage basé sur le plaisir est un apprentissage qui se fera plus facilement. ⛹️
Dans nos établissements scolaires, c’est encore souvent la Motivation extrinsèque qui domine or, selon Grégoire Borst, la perspective d’obtenir une satisfaction personnelle serait plus puissante sur la motivation à long terme que celle d’une récompense finale. On est ici au cœur du réacteur des apprentissages, puisqu’en cultivant le plaisir d’apprendre, on favorise une motivation saine.
Très jeunes, lors de leurs premiers apprentissages, comme les premiers mots, pas, jeux, les enfants éprouvent un plaisir authentique à apprendre. Un plaisir qui tend à s’amoindrir lors de l’entrée dans le système scolaire où la Motivation intrinsèque s’estompe parfois au profit de la Motivation extrinsèque, dont le moteur est le tant redouté bulletin de notes. 🎒
Nos compétences socioémotionnelles jouent un rôle clé dans nos apprentissages. Lorsque nous identifions et comprenons correctement nos émotions et celles des autres, nous développons progressivement les capacités de régulation émotionnelle et d’adaptation sociale. Nous apprenons dès lors à vivre avec les autres !
C’est par le système limbique qu’il est possible de ressentir des émotions, grâce à un traitement cérébral qui génère, en cascade, un ensemble de réactions physiologiques, comme par exemple pleurer ou rire.
Être capable de reconnaître et de réguler ses émotions relève d’un apprentissage progressif :
La régulation des émotions est essentielle dans le processus d’apprentissage des enfants, car elle influence directement leur capacité à se concentrer, à persévérer face aux défis et à interagir positivement avec leurs pairs et enseignants. Lorsqu’un enfant apprend à gérer ses émotions, comme la frustration ou l’anxiété, il est mieux équipé pour faire face aux obstacles académiques sans se décourager.
La régulation émotionnelle favorise aussi un climat de classe plus harmonieux, où les enfants peuvent s’entraider et s’engager dans des activités collaboratives. En somme, enseigner aux enfants des compétences de régulation émotionnelle contribue à leur bien-être personnel et à leur réussite scolaire.
L’Attention, la Mémoire et l’Inhibition sont trois Fonctions Exécutives primordiales pour débuter l’aventure de l’apprentissage, qu’il s’agisse d’apprendre une poésie, de jouer de la batterie ou de retenir la chorégraphie du spectacle de danse de la kermesse. Être capable de fixer son Attention sur une tâche malgré les distractions, se souvenir d’informations pour être en mesure de les manipuler et de les utiliser et, enfin, parvenir à sortir de sa routine en trouvant des solutions rapides et en adéquation avec le contexte dans lequel vous vous trouvez, sont des preuves de la maîtrise de ces trois Fonctions Exécutives.
Développer nos capacités d’Inhibition participe également à la régulation des Émotions, nécessaire aux enfants pour apprendre et mobiliser leurs connaissances sereinement et dans un climat de classe apaisé.
L’apprentissage repose sur un ensemble de processus cognitifs qui se développent tout au long de la vie, au cœur desquels la Métacognition vient également jouer un rôle fondamental.
La Métacognition, ou la capacité à réfléchir sur ses propres processus de pensée, joue également un rôle crucial dans l’apprentissage des jeunes enfants. En leur permettant de prendre conscience de leurs stratégies d’apprentissage, de leurs points forts et de leurs difficultés, la Métacognition les aide à devenir des apprenants plus autonomes et efficaces.
Enfin, dans cette série de podcasts, Grégoire Borst se penche également sur le rôle de la Motivation, et invite à essayer de développer la Motivation intrinsèque, personnelle, l’amélioration “pour soi”, des enfants, plutôt qu’extrinsèque (pour la note et la fierté des parents).